C’est sous le règne de Philippe le Bon, duc de Bourgogne (1396-
Au cours des XVIe et XVIIe siècles des projets de canal voient le jour: Charles Quint (1500- 1558) et son fils Philippe II roi d’Espagne (1527- 1598) avaient donné l’autorisation de réaliser le canal avec le premier vrai projet pour relier le canal de Willebrouck (1561) à Charleroi. Projet sans lendemain.
La saga française du canal de Charleroi à Bruxelles se termina avec les vues de Bonaparte sur le projet, troublées par toute la force qu’il concentra sur une politique étrangère orgueilleusement expansionniste.
C’est l’acheminent économique du charbon qui sous le règne de Guillaume Ier d’Orange (1772- 1843) allait enfin précipiter et concrétiser le tout. A.J. Barthélemy, membre de la seconde chambre des États généraux et conseiller de la Régence à Bruxelles allait porter le projet. Il pensait déjà à utiliser des plans inclinés en lieu et place des écluses, plus coûteuses à l’époque.
J.Fr. Gendebien (1753- 1838) défendait son idée, mais en finale les finances avaient le dernier mot et le choix des écluses fut retenu.
La version actuelle du canal est déjà la quatrième.
Bifurcation de la Sambre vers le canal Charleroi-Bruxelles |
C'est en 1827 que débute la construction du premier canal Charleroi- Bruxelles, conçu par Jean- Baptiste Vifquain. Inauguré en 1832, il relie Dampremy, sur la rive gauche de la Sambre, au canal de Willebroek, place Sainctelette à Bruxelles, et compte cinquante- cinq écluses.
Pour réaliser sa mission, l'ingénieur devra notamment faire face à l'obstacle du relief. Traverser la crête de partage des bassins de la Meuse et de l'Escaut nécessitera entre autres l'aménagement d'une galerie souterraine de 1 200 mètres. Et pour assurer l'alimentation du canal en eau, Vifquain imagina trois réservoirs, dix bassins d'épargne et des prises d'eau à Feluy, Ittre et Ronquières.
Ce canal, intimement lié aux exploitations houillères de la région, est alors accessible aux 70 tonnes ,les « sabots » ou « baquets » de Charleroi.
Il s'essouffle pourtant assez vite face à de nouvelles exigences économiques. Dès 1841, les études démarrent pour sa modernisation à 300 tonnes.
Déjà en 1854 et jusqu’en 1857 les premiers travaux pour réaliser une « grande section » (= moyenne section d’aujourd’hui) de 300 tonnes sur certaines sections allaient bon train! Les ambitions d’élargissement reprennent en 1897 par l’écluse de la porte de Flandre (Bruxelles) qui passe au gabarit de 600 à 800 tonnes.
Toutes les écluses de ce gabarit en aval de Clabecq allaient être conçues avec une capacité de sassement de 1350 tonnes. Ces travaux se terminaient en 1933.
Entre- temps, l'évolution économique a justifié l'adoption d'un gabarit de 600 tonnes en aval de Clabecq. Le but : encourager la création d'entreprises et le développement du port de Bruxelles. Ce gabarit permettait aussi une évacuation efficace des crues de la Senne. Les travaux entraînent la disparition presque complète de l’ancien tracé. Le canal, pleinement opérationnel en 1936, compte désormais trente- huit écluses.
Le dernier grand remaniement (1948- 1968) est le tracé actuel au gabarit européen de 1350 tonnes avec le plan incliné de Ronquières.
Départ du canal à Dampremy |
En 1947, dans le cadre de son programme de modernisation des voies navigables, la Belgique, sous l'impulsion de Gustave Willems, directeur général des Ponts et Chaussées, entame la mise au gabarit du canal à 1 350 tonnes.
L'objectif est alors de répondre à la crise de l'industrie lourde en Hainaut et d'intégrer la voie d'eau dans un réseau plus homogène, répondant à un gabarit européen.
Long de 68 kilomètres, le canal compte aujourd'hui dix écluses et un plan incliné, qui, ensemble, rachètent 123 mètres de dénivellation.
Le canal suit entre autre les vallées de la Sennette, de la Samme et de la Senne.
Destiné à l'origine à desservir les exploitations houillères, le canal est désormais une voie de transit vers France, Hollande et Allemagne. Deux millions de tonnes de marchandises y sont encore transportées chaque année. Quant aux biefs abandonnés lors de la modernisation, comme ceux d'Ittre et Tubize, ils n'accueillent bien souvent plus que des pêcheurs.
Et riche de son patrimoine historique et environnemental, l'ancienne liaison passant par Seneffe, Bornival (Nivelles) et Ronquières, à présent fermée à la circulation, s'est muée en un lieu touristique et de loisirs.
Liaison entre le canal Charleroi-Bruxelles et la Sambre |
Le tunnel à bateaux de Godarville
Dans la première moitié du dix-neuvième siècle, l’industrie charbonnière de la région de Charleroi connut un essor fulgurant, aidée en cela par l’installation de machines à vapeur pour l’épuisement des eaux et bientôt pour l’extraction. Mais le développement économique de la région était singulièrement compromis par le fait que l’écoulement des charbons vers la capitale ou la France ne pouvait se faire que par des voiries à peine carrossables.
Pour améliorer la situation, l’ingénieur Vifquin étudia la possibilité de creuser un canal à gabarit de 60 tonnes entre Charleroi et Bruxelles. Deux écueils se présentaient : le profil du canal serait montant de Charleroi à Gouy, lieu de la crête de partage Vallée du Piéton-Vallée de la Samme et descendant de Gouy jusqu’à Bruxelles (Molenbeek Saint-Jean), ce qui nécessitait pour les deux parties du parcours l’établissement de pas moins de 55 écluses. Le second écueil était le franchissement de la crête de partage au lieu dit «Bête Refaite». La solution retenue pour résoudre ce problème fut le creusement d’un tunnel de 1267 mètres. Pour cette entreprise, les bâtisseurs du canal rencontrèrent de nombreuses difficultés, notamment par la présence de sables mouvants à cet endroit.
Finalement, le canal fut inauguré en 1832 et fut parcouru exclusivement par un seul type d’embarcations, tractés par des hommes ou des chevaux, les "baquets de Charleroi", conçus spécifiquement pour franchir le tunnel de Bête Refaite. Un trajet entre Charleroi et Bruxelles durait de deux à trois jours ! Bien vite le canal initial s’avéra insuffisant et il fallut envisager le creusement d’un nouveau au gabarit de 300 tonnes, dont certains tronçons seraient établis parallèlement à l’ancien. Le franchissement de la crête de partage demeurait entier : après l’étude d’un projet d’ascenseur hydraulique, c’est de nouveau la solution du creusement d’un nouveau tunnel de 1049 mètres qui fut retenue. Les mêmes difficultés s’opposèrent à nouveau au personnel chargé du fonçage : aussitôt, ils furent confrontés aux sables mouvants et aux venues d’eau. Ce nouvel ouvrage de 3 mètres 80 de section fut opérationnel en 1886, soit quatre ans après le début des travaux.
Le nouveau canal permit la navigation des péniches de 300 tonnes, mais le temps de parcours de Charleroi à Bruxelles restait très élevé, plus d’un jour dans le meilleur des cas. Le tunnel de Godarville représenta rapidement un goulet d’étranglement : il ne permettait son franchissement qu’à sens unique et par seulement une péniche à la fois, qui devait de surcroît être pilotée durant le parcours. L’éclairage était insuffisant et l’apparition dans les années 1930 des péniches motorisées qui enfumaient littéralement l’intérieur du tunnel ne facilitait pas les choses. Son entretien commença aussi à poser des problèmes...
Entre-temps, on décida de porter le canal au gabarit de 1350 tonnes. Il était hors de question de conserver un nombre élevé d’écluses, et encore moins de recourir de nouveau à la solution du tunnel pour le franchissement de la crête de partage. Il fut décidé de la franchir par une énorme tranchée parallèle à l’ancien tracé. C’est ainsi que le tunnel de Godarville vit son dernier bateau le traverser en 1958.
Aujourd’hui, le tunnel est toujours là et est parcourable de bout en bout par son chemin de hallage. Il est toujours sous eau jusqu’au trois quart de son tracé, endroit où son lit a été comblé. L’entrée côté Bruxelles est toujours intacte, tandis que celle côté Charleroi est remblayée jusqu’à la moitié de sa hauteur.
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